6 Février 2019
Texte rédigé à partir d'articles parus les 5 et 6 février de Radio-Canada, de Pressreader et de la Tribune.
Rappelons que plus de 90 langues autochtones coexistent au Canada. Les trois quarts sont considérées comme « en danger » par l'UNESCO.
La situation est beaucoup plus préoccupante dans les communautés des Premières Nations - avec de très grandes différences en leur sein – que chez les Inuit, où elle est très majoritairement parlée dans les familles et dans les villages et chez qui elle est la langue exclusive d’enseignement pendant les trois premières années du primaire .
Un aîné métis manitobain et expert en langue mitchif, Normand Fleury (…) précise que les Autochtones travaillent à la préservation et à la revitalisation de leurs langues, même si la connaissance des locuteurs peut être parcellaire. «Il y a ceux qui comprennent [leur langue traditionnelle], mais ne [la] parlent pas, ceux qui [la] parlent et ceux qui l’écrivent».
L'anthropologue Yves Labrèche (…) mentionne également la difficulté de trouver un nombre suffisant de locuteurs. «Sauf chez les Inuits, les jeunes locuteurs des langues autochtones sont de moins en moins nombreux» et il souligne la difficulté de trouver des ressources pédagogiques (car) «Les peuples autochtones valorisent la tradition orale plutôt que l’écriture et les méthodes d’apprentissage qu’ils préconisent diffèrent des méthodes qui prévalent dans le système d’éducation conçu pour la majorité non autochtone».
Promis depuis 2016 par Justin Trudeau, le projet de loi C-91 déposé le 5 février 2019 à Ottawa reconnaît que «les langues autochtones font partie intégrante des cultures et des identités des peuples autochtones et de la société canadienne».
Le projet de loi C-91 prévoit un financement « adéquat, stable et à long terme » pour « la réappropriation, la revitalisation, le maintien et le renforcement » des 90 langues autochtones parlées un peu partout au pays. Il incite également les institutions fédérales à traduire certains de leurs documents et à offrir des services d’interprétation. Le poste de commissaire aux langues autochtones serait créé pour promouvoir ces langues, agir en tant que médiateur en cas de différend et surveiller l’efficacité du financement fédéral.
Si plusieurs défenseurs des questions appartenant aux Premières Nations l’accueillent positivement, tout en regrettant son manque de mesures concrètes et d’engagements de financement, si des chercheurs s’interrogent de savoir si ce n’est pas trop peu ou trop tard pour revitaliser les langues autochtones, les Inuits de l'association Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) se sont pour leur part montrés déçus de la proposition à leurs yeux strictement «symbolique» d’Ottawa.
«Bien que cette initiative soit caractérisée comme une marque de réconciliation et de co-développement, le gouvernement du Canada a fait preuve de mauvaise foi avec les Inuits», a dit le chef de l’ITK Natan Obed. Il s’agit d’un acte manqué, selon l’Inuit Tapiriit Kanatami1 (ITK) qui aurait voulu que l’inuktitut obtienne le statut de langue officielle au même titre que le français et l’anglais. Il a poursuivi par voie de communiqué « L’absence de contenu spécifiquement inuit suggère que ce projet de loi est une autre initiative élaborée derrière des portes closes par un système colonial, puis imposé aux Inuits », a déclaré le président de l’ITK, Natan Obed,.
Nous reviendrons dans un prochain article sur la langue inuktitut et sur sa situation au Nunavik
1L'Inuit Tapiriit Kanatami (ᐃᓄᐃᑦ ᑕᐱᕇᑦ ᑲᓇᑕᒥ) est une organisation au Canada qui représente plus de 50 400 Inuits. Un des buts de l'organisation est de préserver la culture inuite ainsi que leur langue, l'inuktitut. L'organisation représente aussi les Inuits dans les pourparlers avec le gouvernement du Canada et parle publiquement en leur nom.